PROPOS SUR L’AFFAIRE GRIVEAUX
14 février 2020, La République En Marche est ébranlée. Ce matin, le candidat Benjamin Griveaux annonce le retrait de sa candidature à la Mairie de Paris. À la suite de la publication de vidéos à caractère sexuel, il explique « Comme si ce n’était pas suffisant, hier, un nouveau stade a été franchi. Un site internet et des réseaux sociaux ont relayé des attaques ignobles mettant en cause ma vie privée. Ma famille ne mérite pas cela ». Étant ministre au moment des faits (2018), ce scandale semble une fois de plus affaiblir la majorité. Outre la polémique, cela pose des véritables questions sur le rôle de l’homme politique dans la société ainsi que sur les méthodes utilisées pour mettre à mal des élections libres et démocratiques.
Concernant le premier point, la vidéo de Benjamin Griveaux est inexcusable. De fait, cette vidéo n’a pas été prise à son insu. Il l’a envoyée librement à une femme qui voulait vraisemblablement le piéger. Il semble difficile d’imaginer qu’un ministre en exercice puisse envoyer cela. Il y a eu une négligence de sa part qui est indéfendable. Une fois envoyée, il n’en était plus maître. De plus, il semble ne pas avoir tenu compte du fameux triangle des vulnérabilités : le sexe, le pouvoir, l’argent. En effet, ces trois points sont ceux qui permettent d’affaiblir des individus. Lorsque des personnes mal intentionnées cherchent à nuire, elles feront en sorte de toucher à l’un de ces trois points. Une fois, la vidéo en poche, il était simple de le faire chanter. Personne ne souhaite voir sa vie privée bafouée de la sorte. En tant que membre du gouvernement, il aurait dû avoir conscience de cela sans risquer un scandale pour la République. C’est d’autant plus grave qu’en tant que porte-parole du gouvernement il avait accès à des secrets d’État. A-t-il dû divulguer des informations pour retarder la diffusion de la vidéo ? La question est légitime.
De plus, cette vidéo accroît le gouffre qui se crée entre le gouvernement et la population. En effet, les Français en ont assez des scandales politiques. Comme l’a montré l’affaire Fillon, ils se méfient de leurs élites qui semblent déconnectées de la réalité. Contre son gré, l’homme politique doit montrer l’exemple. Il représente la population et c’est en ça qu’il ne doit pas flancher. Un adage militaire explique justement que « La troupe est à l’image du chef ». Dans ce cadre, les élus doivent incarner leur population avec abnégation et courage. Il est difficile d’accorder du crédit à Benjamin Griveaux après ça. Cela rappelle donc à quel point les hommes politiques doivent viser le bien commun sans se servir. Il est clair que travailler tel Stakhanov sans reconnaissance peut être difficile, mais c’est ce qui fait la grandeur de cet engagement. Un homme politique droit suscitera toujours le respect et l’inspiration. De Gaulle fut justement autant aimé grâce à son abnégation durant la Seconde Guerre Mondiale. Il n’a jamais cédé à la tentation d’abandonner. Sans prétendre à avoir le charisme de cet homme, le politique doit chercher à être exemplaire. En agissant de la sorte, Benjamin Griveaux n’a pas su se montrer à la hauteur. Les Français veulent des chefs, capables de sacrifices pour ce qu’ils croient. Le tort du candidat déchu est donc son manque d’exemplarité et la véracité des faits. Il n’a pas porté plainte pour diffamation mais bien pour atteinte à la vie privée.
Néanmoins, ces méthodes d’intimidation semblent témoigner d’un contexte actuel inquiétant. Voir un activiste russe, Piotr Pavlenski, attaquer aussi violemment un homme politique et influer sur une élection démocratique n’est pas acceptable. Depuis quelques années, le débat de fond, nécessaire au bond fonctionnement de nos institutions, est bafoué par des individus prêts à tout pour porter atteinte à la démocratie. Il est même paradoxal de voir Piotr Pavlenski déstabiliser des élections alors que lui-même critique ce manque de liberté en Russie. En outre, cet homme est totalement illégitime pour imposer ses vues sur les Municipales parisiennes. Ses agissements en Russie n’aidaient déjà pas à cela. En 2012, il se coud les lèvres. En 2013, il se cloue les testicules sur la Place Rouge. Drôles de protestations… Comme si ce n’était pas suffisant, il tente de brûler une filiale de la Banque de France à Paris alors que celui-ci a justement le statut de réfugié politique en France. Un étranger, sans aucune légitimité, est donc capable de mettre à mal des processus républicains. Gage de son envie de nuire, il se vante de son action et nous explique que d’autres suivront. Le gouvernement français doit légiférer contre ces agissements.
Ce scrutin soulève la question du rôle des médias et d’internet dans la vie politique française. Qu’ils servent à révéler des scandales est une bonne chose, cela incite les hommes politiques à adopter un comportement vertueux. En revanche, que ces instruments servent à mettre au grand jour la vie privée d’Hommes publics est intolérable. Personne ne souhaite voir sa vie privée jetée dans la fosse médiatique et il est important de distinguer cela. Forte de cette idée, l’ensemble de la classe politique a apporté son soutien à Benjamin Griveaux, clamant l’importance d’un débat politique sain. Le gouvernement doit donc intervenir afin de distinguer davantage le public du privé. Cela en va du caractère incitatif que doit avoir la politique. En effet, de nombreux talents peuvent avoir envie de tourner le dos à cette activité en raison de la violence qui émane de ce genre de pratique.
Ainsi, le scandale Griveaux témoigne pleinement du rôle du politique dans la société française. Comme toute crise, il doit permettre d’apporter un souffle nouveau à la politique afin d’aller vers une exemplarité idoine. En revanche, c’est à la République de mettre en œuvre les réformes adéquates, notamment pour empêcher certains individus de nuire.
Louis Sastre, pour Jeunesses de France, le 19 février 2020.